"Car nous sommes Son ouvrage, ayant été créés en Jésus-Christ pour de bonnes œuvres, que Dieu a préparées d’avance, afin que nous les pratiquions."
Éphésiens 2:10
Nos trois amis ne demandaient même pas à Dieu quel serait désormais leur devenir.
Ils savaient qu’ils étaient sur la route, et, comme Abraham, selon leur vocation, qu’ils devraient devoir obéir et partir pour un lieu qu’ils devrait recevoir en héritage, et avancer sans savoir où ils allaient.
C’est de cela qu’ils parlèrent après avoir encore reçu la grâce et la confiance en Dieu.
Le constat était que leur nouvelle foi n’avait aucune place dans des murs sans Église.
Ces murs, appartenant à une fédération, une structure humaine qui dictait des lois aux antipodes de ce que qu’était le Seigneur, ne pouvait accueillir le souffle du Saint Esprit, Ruah, et il fallait bien se résoudre à les quitter puisque personne ne s’y sentait pas à l’aise. Même pas Dieu.
Ils comprenaient tous maintenant pourquoi il y avait tant de haine dans le cœur des ouailles dans leur assemblée comme dans les autres dites plus « libérées ».
Pourtant, leur dénomination n’était pas plus sévère que les autres et même « réveillée » selon le terme utilisé par les chrétiens évangéliques.
Comparée à la Catholique Romaine, aux tristes Réformés, aux paisibles Baptistes joyeux mais tristes au fond de leur cœur, aux évangéliques proclamés dont nous faisions partie, leur assemblée dont on taira le nom n’était vivante que dans la publicité. Éclairés par la grâce, les deux hommes et la femme n’y voyaient plus la Maison de Dieu.
Ils n’en avaient même pas parlé entre eux avant ce jour car savaient bien que « les chrétiens rebelles » sont toujours mal vus dans les assemblées. Rebelles à une politique qui les tient prisonniers.
Oui mais voilà. Qu’allaient-ils faire de leur liberté comme un oiseau en cage qui vient de s’échapper ?
Sauraient-ils se nourrir, trouveraient-ils des frères sans être plus ou moins accusés ?
Où vivraient-ils leur foi et à qui en parler ?
Frères, que ferons nous ? Demanda Martine d’une petite voix.
Je ne sais pas répondit son mari n’ayant aucune idée.
Le jeune pasteur Jo, pensif, avait la gorge nouée.
Allait-il dévoiler à ses frères qu’il faut renoncer à soi même avant d’expérimenter la Lumière, que suivre Jésus avait un prix bien difficile à payer ?
Pour lui, il savait ce qu’était de changer de paroisse et être haï du peuple et de ses faux bergers.
N’ayant pas charge de famille, il pouvait à son grès aller ou bien venir et exposer sa vie sans craindre pour sa peau.
Mais ce couple, perdu dans un monde qui les avait formé, formaté, rabaissé au rang d’une chose, d’un « membre d’église » qui n’a plus aucun droit si ce n’est celui de diriger un troupeau sans âme avec les consignes venues d’une entité presque Pape, ce couple était égaré et n’avait plus de repères.
Monsieur Le Pasteur Principal en chef se trouvait comme au chômage, un SDF qui ne sait plus où aller.
Roger, dit-il la voix presque voilée, cela va être difficile pour vous dans les jours à venir.
Ce que vous avez prêché pendant toutes ces années, il va falloir le mettre en pratique mais ça ira puisque vous y croyez maintenant.
Il ne se rendit pas compte de son audace. C’est lui qui s’apprêtait à enseigner un Pasteur Principal.
Les regardant attendri du haut des cieux, Jésus, Lui, souriait.
Je ne suis plus Pasteur Principal répondit Roger très paisible, je suis ton frère et nous allons nous tutoyer.
J’ai bien compris qu’il fallait changer la méthode car mon cœur n’est plus le même, poursuivit-il ayant repris de l’assurance,.
J’ai relu ce matin 1 corinthiens 13 avant de me lever et je crois que Dieu m’a parlé.
« Maintenant donc ces trois choses demeurent: la foi, l’espérance, l’amour; mais la plus grande de ces choses, c’est l’amour. »
Jusqu’à ces jours-ci, l’espérance que je prêchait n’était qu’intellectuelle et je ne savais pas que Jésus existait réellement. Maintenant, je crois.
Ma foi aussi était symbolique, je vois ce que je crois et cette grâce qui m’avait touchée est devenue mienne sans que je comprenne encore pourquoi ; mais je sais qu’elle est là.
L’amour, j’avoue que je ne savais même pas ce que c’était après que tu m’aies dit l’autre jour, Jo, que j’étais un imbécile.
Oui, je sais, tu ne l’a pas vraiment prononcé, mais j’ai su à ce moment que tu l’avais pensé et c’est cette vérité qui m’a ouvert les yeux ; J’étais un imbécile.
Sa femme lui jeta un coup d’œil en coin incrédule. Jamais elle n’avait entendu une chose pareille. Roger reconnaître qu’il s’était trompé !
Elle aurait été pentecôtiste de naissance, elle aurait crié « Alléluia » mais sa réserve légendaire se gardait de laisser transparaître une émotion qui n’avait pas de nom. Elle n’en loua pas moins son Seigneur avec joie mais discrètement.
Il va nous falloir prendre des dispositions, continua Roger non sans appréhension.
Tout d’abord, je vais convoquer les évêques et leur dire ce que je pense de leur autorité.
Ils vont me virer mais de toutes façons, non seulement je me rends compte qu’ils ne me servent, à rien mais je comprends qu’ils empêchent le peuple d’avancer.
Les seuls chrétiens qui viennent dans nos églises souffrent et vivent leur foi chez eux. J’ai bien vu qu’il y en avais quelques uns qui ne parlent pas comme les autres et ont un regard différent.
Certes, il n’y en a pas beaucoup mais ce peu me faisait peur et je n’osais les aborder de crainte qu’ils aient quelque chose à m’apprendre. J’ai préféré les éviter. Ah, si j’avais su !
Bon, on va se retrouver à la rue, il jeta un regard inquiet vers son épouse, mais j’ai depuis hier la certitude que ce que Dieu dit, Il le fait et il n’y a aucune raison qu’il ne pourvoit pas aux besoins matériel de ses serviteurs. Sinon, j’aurais du mal à croire qu’Il existe.
Jo et Martine reçurent de plein fouet cette Parole de foi et Jésus regarda vers Son Père.
Comme un rideau déchiré, les portes de la banque du ciel s’ouvrirent et accueillirent ce matin là trois nouveaux clients décidés.
Je sais Jo que vous en êtes, poursuivit le frère Roger sur sa lancée.
Jésus a promis de répondre aux demandes et nous avons prié en ce sens. Il va dés aujourd’hui nous donner ce qui nous manque. Une direction où aller.
Un homme ce matin-là est devenu prophète. La promesse était en train de se réaliser.
Jo hocha la tête et se dirigea sans mot dire vers le téléphone.
Il appela sur son portable la présidente du comité de l’église qu’il savait attendre devant la porte, et lui confirma la réunion de l’après midi. Pour le ménage de la salle, exceptionnellement aujourd’hui on attendrait.
Il confia que les pasteurs avaient besoin de réfléchir et sans doute feraient une annonce importante et la priait de s’assurer que les membres du comité honorent cette réunion en particulier.
Il aurait pu très bien aller ouvrir les portes et faire comme si de rien n’était et attendre tranquillement le moment de la rencontre, mais il pressentait qu’il fallait « préparer » les invités à ce qu’ils allaient entendre et n’avait pas le temps de finasser.
De toutes façons, les bruits allaient courir, la rumeur enfler, et autant en finir tout de suite. Ce coup de téléphone allait donner à la Présidente de quoi exprimer son imagination et dans une heure toute la ville saurait que quelque chose d’important se passait à l’église.
Bon, c’est un coup bas avoua-t-il à ses amis interloqués, mais je crois qu’un bon buzz vaut mieux qu’une longue attente. Nous sommes certains d’afficher complet à la réunion et pourrons ainsi mieux parler.
Le couple n’osa pas rire et on se prépara du café.
La question du moment fut de savoir si on prévenait l’évêque avant, le mettant ainsi devant le fait accompli, ou après la réunion.
Certes, il restait trois jours avant Dimanche où, suite à la rencontre du comité du jour on annoncerait à la paroisse la démission des pasteurs en promettant continuité du service jusqu’à l’arrivée du futur remplaçant.
La préoccupation de l’ex Pasteur principal était qu’il ne voudrait pas faire de tord à sa dénomination car, s’il la trouvait désormais désuète et inutile , il avait toutefois fait sa vie dedans et de toutes façons respectait sa famille.
De plus, « faire des vagues » ne l’enchantait pas trop et il ne goûtait pas de finir crucifié. Il se tourna vers sa femme.
- Comment faire pour ne pas les choquer ?
Martine le regarda et lui dit sans ambages…
Cela va être dur et quoi que tu fasse, ça va faire du bruit.
Pas nécessairement intervint Jo qui ne savait pas de quoi il parlait.
Si nous attendons avant notre départ la relève, les membres de l’église ne seront pas informés de nos nouvelles dispositions de cœur et nous pourrions aller travailler dans une ville voisine, non ?
Jésus rougit de frayeur
Pas de ça Jo répondit sèchement Roger presque déjà en colère. Partiriez-vous en douce sans rien leur expliquer ?
Et Jo se rappela l’histoire de l’ivrogne qui frappait si bien sa femme au début de ce livre. Il n’avait su comment lui parler mais le Seigneur était venu à son secours et avait, par un courage inspiré, dit la vérité à cet homme ce qui l’avait immédiatement sauvé.
Oui, c’est vrai concéda Jo un peu piteux quand même, il faut leur dire pourquoi nous ne pouvons pas rester.
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