A peine trois mois s’étaient écoulés depuis le jour où l’Église avait déménagée du "bistrot d’en face" dans les murs lui servant de point de rendez-vous, et nous étions maintenant à peu prés soixante personnes dont quelques unes restaient à baptiser.

Gérard d’Orville n’avait pas voulu attendre et avait aussi demandé le baptême à  ses frères. Il voulait témoigner au plus vite de  sa « résurrection » comme il se plaisait à le dire, et on le trempa dans la piscine de la ville avec l’accord du Maire qui vit là une occasion d’affirmer sa foi aux yeux de tous au grand dam de ses ennemis politique.

Il est vrai que c’était la grande mode à l’époque de la promotion de la laïcité, et ceux qui disaient ne pas croire en Dieu l’avait attaqué en plein conseil municipal de façon violente. Les bâtiments administratifs ne devaient pas être utilisés pour les activités d’un culte.

Georges Lapige, qui avait appris à prier, demanda vite à son Seigneur ce qu’il fallait leur répondre et Jésus lui dit en souriant…

- Ouvre la bouche et je la remplirai.

Dominant son public effaré, le Maire de la ville, tint un raisonnement absolument extraordinaire si on en croit les journalistes présents qui se firent une joie de raconter la scène intensifiant quelque peu à l’émotion qu’on devine.

Le Maire avait dit…

- Nous avons des églises qui appartiennent à la commune et occupées par "l’église catholique" qui nous paye un loyer.
Personne ne voit de mal à ce qu’on y célèbre des baptêmes, des mariages, des messes ou autres rencontres religieuses.
Nous louons la salle municipale aux Protestants chaque année quand ils présentent la Bible dans le cadre de leurs activités.
Nous mettons à disposition cette même salle aux partis politique dont certains sont considérés par leurs adversaires comme de vraies religions, et nous accordons aux associations l’utilisation des locaux prévus à cet effet.
Elles reçoivent tout le monde même les bouddhistes et autres mouvements dont certains sont pourtant jugés plutôt un peu olé-olé car traitant de spiritualité.
La piscine sert à nager et accueillir des manifestations intéressant nos administrés, et je ne vois pas pourquoi ceux qui l’utilisent ne pourraient pas y prier si cela leur fait plaisir. Allez-vous empêcher aussi le peuple de respirer ? »

L’élu communiste desserra sa cravate et le premier adjoint, membre d’une loge maçonnique, eut une vision prémonitoire. Il entrevoyait la municipalité retirer son agrément aux multiples structures associatives de façade cachant discrètement des activités plus prosélytes qu’autre choses et financées par les deniers publics. Il fallait céder au Maire.

Le public, qui n’avait pas de parti pris et était plutôt amusé par la tirade du Maire, lui fit une ovation et l’Église emporta la permission de baptiser exceptionnellement ses ouailles à la piscine municipale. Dans le petit bassin pour plus de sécurité.

La gazette de la région ayant répandu la nouvelle, ce sont au moins trois cents personnes qui assistèrent au baptême de l’ex-SDF et entendirent son témoignage alors qu’il n’en demandait pas tant.

Personne n’a jamais su pourquoi nous n’avions pas utilisé comme d’habitude le baptistère de l’Église, mais, les voies de Dieu restant impénétrables, nos croyants se réjouirent en constatant une fois de plus que ce dernier avait bien plus de culot qu’eux.

« Car ce n’est pas un esprit de timidité que Dieu nous a donné, mais un esprit de force, d’amour et de sagesse. » 2 Timothée 1:7

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Et la vie continuait dans la ville et, quand je parle de vie, ce n’était plus celle austère que connaissaient les chrétiens de naguère, du moins de la communauté qui les avait précédée, mais une vie riche d’événements, de joies et de victoires. Plus personne maintenant ne se cachait.

La grande différence avec les chrétiens d’église qu’on rencontrait dans leur bocal, c’est que le discours n’était pas le même.

Un « chrétien d’église », quand il « évangélisait », disait à son interlocuteur…

- Viens à l’église Dimanche, nous aurons un orateur exceptionnel, ou « un groupe de chant très béni », ou encore « tu vas rencontrer des gens plus qu’intéressants ».

Il ne parlait jamais de Jésus, du péché ou de l’enfer, et laissait cette joie et cette responsabilité aux prédicateurs qui après tout étaient payés pour cela.

Quand il essayait par eux-même, ils bredouillait des phrases apprises par cœur et qui n’avaient aucun sens pour ses auditeurs qui n’avaient aucune idée de ce que voulait dire la fameuse affirmation « Jésus sauve !» et, le seul truc qui pouvait les intéresser en était une autre : « Jésus guérit !».

Là, comme tous souffraient de quelque chose, il était bénéfique de se laisser entraîner « à l’église » et, si quelques uns d’entre eux expérimentaient parfois les charismes, ils se retiraient vite en constatant qu’il s’agissait souvent de publicité mensongère.

Pour les autres, qui avaient « accroché » pour une raison ou une autre (solitude, misère, évangile de la prospérité), ils se fondaient vite dans la masse en apprenant les chants évangéliques et le patois de Canaan. En trois visites, on devient chrétien mais…

Mais il y a un « mais » et on connaissait très vite le prix à payer.

Oh ! Pas seulement la dîme ou les sommes pas toujours modestes qu’il fallait débourser, mais aussi l’abandon d’habitudes pas bibliques et, si certains réussissaient à donner le change en laissant de côté les péchés les plus voyants, la continuation dans les œuvres du diable était une vraie torture car il fallait la cacher. Ils ne trouvaient dans ces conditions jamais la paix.

Cela donnait des blessés avec les nerfs à fleur de peau, des raisonnements débiles pour expliquer leur mauvaise volonté, une angoisse permanente d’être découvert et de ne plus pouvoir tricher et une relation tendue avec ceux d’entre les frères qui avaient compris quelque chose à "l’abandon des œuvres mortes".

Malheureusement, il n’y en avait pas beaucoup, quelquefois aucun, et même « les pasteurs » pratiquaient ouvertement le contraire de ce qu’ils prêchaient ce qui rassurait plus ou moins tout le monde.

Il en sortait de « l’église » autant qu’il en rentrait, les plus spirituels étant bien sûr assimilés au nombre d’années qu’ils fréquentaient l’assemblée.

Le credo était : « Plus tu es soumis, plus tu restes, et si tu te laisses formater, tu seras heureux et tu vivras. »

Les récipiendaires de ce drôle d’évangile étaient grande majorité dans  les églises et il ne faut pas s’étonner si ils étaient austères, voire moroses, malgré les sourires d’apparence et même moribonds mais tout le monde sait cela. Même toi ami qui me lis.

Au sein de l’Église de la ville, c’est exactement le contraire qui se passait.

Les frères reconnaissaient qu’un de leur prosélyte était « venu au Seigneur » non pas à son discours, aussi spirituel soit-il, mais à la physionomie et à « l’esprit » qu’il dégageait.

Par exemple, quand Gérard D’Orville était définitivement passé des ténèbres à la Lumière, le soir-même, il n’était plus le même homme.

Lui qui était toujours triste, fuyant et perdu dans ses pensées, avait le visage illuminé comme si il avait rencontré le ciel ce qui ma foi correspond assez à la description qu’on avait pu en faire.

C’était comme le Zachée de la Bible.

C’est homme était un vilain péager qu’un jour Jésus interpella en lui disant…

- Il faut que je demeure aujourd’hui dans ta maison  (Luc 19:1-10)

Il est écrit que Zachée se hâta de descendre (de son arbre) , et le reçut avec joie.

Absolument tous les gens qui rencontrent Jésus et le laissent entrer dans leur maison ont cette particularité de changer immédiatement de caractère et de physionomie. De tristes, maussades et c**s qu’ils étaient au départ, ils sont devenus joyeux que ce soit dans la Bible pour ceux qui faisaient une telle rencontre que dans la vie de tous les jours aujourd’hui quand un pécheur se repent.

A ne pas confondre avec un pécheur qui se repends (du verbe pendre) en « retournant dans le monde », c’est à dire en quittant la Maison de Dieu, et ne vous étonnez pas si vous voyez tant de « chrétiens » si tristes et mal fichus comme nous en croisons tous les jours.

Mais comme tous ceux qui sont venus à la Lumière, Gérard était rayonnant quand il est rentré le soir à l’Église et les frères lui ont demandé…

- Qu’est-ce qu’il t’arrive ?

Il n’a pas répondu et a encore été se cacher pour profiter dans son intimité de cette nouvelle naissance qui venait de le transformer et n’avait qu’un seul nom.

Cette nuit-là, pendant son tête à tête avec son Seigneur, le garçon reçu des promesses et un ordre de route pour sa nouvelle vie.

- Tu ira chercher ceux qui sont comme toi.

De clochard d’habitude, notre homme fut propulsé au rang d’évangéliste. Il en sauva des centaines et peut-être bien des milliers.

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Des exemple comme celui-là, on en comptait déjà au moins soixante dans l’Église de la ville.

Jo, Roger, Martine, Jules, Marcel, Baptiste, Josiane, Georges et les autres, tous avaient reçu ce cadeau merveilleux alors qu’ils n’avaient en fait rien demandé mais étaient entrés dans l’obéissance.

Tous, sans s’être concertés, avaient vécu la même expérience et n’avaient plus besoin de livres spirituels ou présentés comme tel pour rencontrer le Dieu vivant qui parlait à Ses enfants et les guidait dans la voie qu’il devaient suivre.
Tous avaient un Job et un seul et même patron. L’Éternel des armées.

A propos de job, Jo et Roger ne touchaient plus aucun subside de leur ancienne fédération et, ne voulant pas pointer au chômage, avaient dû trouver un travail séculier pour ne pas être à la charge de la jeune communauté qui grandissait à défaut de grossir.

Bien sûr, ils auraient pu revendiquer un salaire mais  trop d’abus avaient été constatés dans la corporation à ce propos. Pasteur n’est pas un métier mais un appel de Dieu, un ministère, et ils auraient été gênés d’accepter la proposition des frères en ce sens.

Ne serait-ce que pour rester libres de proclamer la Vérité, ils devaient être indépendants financièrement et considéraient les dons comme appartenant à Dieu pour l’avancement de Son œuvre. Ils n’y touchaient jamais pour eux-même.

Encore une fois, leur Seigneur avait pourvu et Roger s’était vu proposer un poste dans une association qui se préoccupait de littérature et Jo entra au service d’une société d’ambulance qui lui offrit la formation pour le brevet.

Bien sûr, quelques mauvaises langues prétendirent que le Maire les avait pistonnés, mais ils avaient leur conscience pour eux et ne se laissèrent pas déstabiliser par les ragots. Leur préoccupation était d’assurer la conduite de l’Église et du temps qu’il leur restait pour exercer le ministère.

Alors, ils avaient formé les premiers disciples à assurer les tâches courantes dans l’Église et Dieu donnait Lui-même les capacités et la volonté de bien faire. Il pouvaient s’absenter sans crainte et leurs jeunes frères commençaient à prêcher.

Puisqu’ils étaient capables de développer le plan du Salut à un particulier, pourquoi ne parleraient-ils pas à soixante disciples et même aux foules s’ils en avaient l’occasion ? Jésus n’avait pas de micro n’avait pas fait d’école biblique.

Les besoins des membres de l’Église étaient répertoriés et, s’ils n’en étaient pas encore à partager équitablement leurs biens comme dans les Actes des Apôtres, personne ne manquait de rien et il n’y avait pas non plus de surplus.

Si l’un ou l’autre avait besoin d’un job ou d’une nouvelle voiture, c’est tous qui priaient ensemble ou chacun chez soi et aidaient l’autre à obtenir ce dont il avait besoin et, quand ils ne pouvaient pas, c’est Dieu Lui-même qui pourvoyait comme pourrait le raconter Baptiste.
Son passé de voleur lui avait valu quelques soucis avec les gendarmes et la justice et il était connu dans la région pour être un garnement à qui on ne pouvait pas faire confiance.

Animé d’une bonne volonté hors du commun, Baptiste avait écumé les propositions d’emploi et bureaux de placement de la commune et celles environnantes mais, outre le fait qu’il ne savait rien faire, il était devenu timide et n’avait pas confiance en lui-même. Personne ne voulait de lui.

Là encore, les frères réunis élevèrent la voix vers Dieu et « réclamèrent » un travail pour l’un des leurs en ayant l’assurance que c’était dans Sa volonté et qu’Il leur donnerait ce qu’ils avaient demandé.

Le lendemain, Baptiste n’avait pas encore honoré son premier rendez-vous que le conducteur d’une limousine lui demanda son chemin dans la rue.

Comme s’était dans sa direction, Baptiste proposa de le piloter et en profita pour parler de Jésus comme si c’était vraiment le moment.
Le chauffeur, peu décidé à écouter son histoire, le fit taire gentiment et lui demanda qui il était et le garçon répondit qu’il était serrurier ce qui était un peu vrai vu son passé de cambrioleur. Il avait en fait dit la première chose qui lui passait par la tête.

- Serrurier, répondit le conducteur un peu pensif, voulez-vous un travail jeune homme ?
- Ben, je ne suis que débutant et j’ai besoin de formation.
- Je peux vous arranger cela car dans mon entreprise, j’ai un chef d’atelier qui va prendre sa retraite et qui cherche un jeune à former. Cela vous intéresse-t-il ?
- Cela me plairait assez mais il faut que je vous dise…

Rougissant, Baptiste raconta son histoire sans rien cacher de son passé et expliqua comment il crochetait les serrures mais n’avait jamais appris à les remettre en état. Ce job lui plairait bien et il voudrait bien essayer.

L’homme le regarda avec un sourire et ne lui avoua pas que lui-même avait fait dans le temps de la prison pour des erreurs de jeunesse. Il avait eu sa chance et, en lui donnant sa carte de visite, il se dit que c’était à son tour de renvoyer l’ascenseur.

- Demain à l’usine à huit heure. Nous vous attendons.

Baptiste remercia dans son cœur son Dieu qui sait y faire et téléphona à son rendez-vous pour se décommander. Il avait enfin trouvé du boulot.

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Pendant ce temps, l’équipe à Jo s’était organisée pour assurer un semblant d’organisation dans l’Église mais il n’y avait rien de figé.

On disait « l’équipe à Jo » car ce dernier était très proche des jeunes et n’avait pas son pareil pour accueillir les nouveaux arrivants et insuffler ce charisme à ses protégés qui trouvaient à leur tour naturel de se mettre à la disposition des autres.
Il faut dire que les « célibataires » étaient plus disponibles que les frères vivant en famille ce qui n’empêchait pas ces derniers de mettre la main à la pâte et d’ouvrir la porte de leur maison quand besoin en était.

En fait, il était prêché que rien ne leur appartenant en propre, et si ils continuaient à assurer la gestions de leurs biens, ils comprenaient que l’or et l’argent appartiennent à Dieu qui met ce moyen à disposition des hommes mais que ces moyens doivent rester disponibles pour Son oeuvre en tout temps.

Cela évitait la capitalisation au travers de structures pas toujours bien contrôlées par la faiblesse humaine et les dérives que nous avions hélas constatées au sein de beaucoup d’organisations religieuses.

Et comme chacun donnait ou prêtait volontairement, c’est à dire en en ayant vraiment envie, nous ne rencontrions pas de problème d’argent dans l’Église.

Les repas en commun perduraient midi et soir dans les locaux et chacun apportait sa quote-part. Même pour les visiteurs, il n’y avait jamais de prix demandé.

Pour les frais relatifs au bâtiment par lui-même, un tronc très discret avait été déposé dans une des salles et chacun venait glisser son obole sans aucune sollicitation de la part de qui que ce soit.
Nous avions aussi éliminé les demandes d’argent, récurrentes ou pas, et nous croyions fermement que Dieu subvenait à tous nos besoins. Seuls, les membres de l’Église savaient ces dispositions et les gens de l’extérieur n’étaient pas invités à participer.

Pour la question de la dîme, il avait dés le début été décidé qu’elle n’était pas obligatoire, que les frères savaient ce qu’ils avaient à faire selon leur budget, et de toutes façons, l’Église n’ayant pas beaucoup de besoins pour elle-même, la plus grande partie du pécule était réservée à l’accueil et aux pauvres c’est à dire à ceux qui en avaient besoin. Qui qu’ils soient.
Bien que cela soit très informel, des commissions avaient été mises en place qui se partageaient le tâches que Jules le cafetier nommait pompeusement « Ministères ». A l’apéro, il avait raconté au facteur pour se ficher de lui et l’impressionner…

- Nous avons le Ministère de l’évangélisation, celui de l’accueil des visiteurs, le Ministère Pastoral, le Ministère de l’organisation écrite (il parlait du bureau administratif), Celui de l’enseignement et de la croissance et, en faisant d’un clin d’œil une discrète allusion au Maire, le Ministère des relations extérieures.

Le facteur n’en croyait pas ses oreilles et le raconta à sa femme qui se chargea d’en faire profiter tout le quartier et la rumeur se répandit au marché où l’épouse de Roger faisait ses courses.

- Comment dois-je vous appeler maintenant ? lui demanda finaud le primeur, Madame la Ministresse ?
- Pardon ? fit Martine interloquée
- Oui, il paraît que le pasteur a gagné un poste de ministre dit l’autre pince sans rire
- Vous voulez m’expliquer ?

Et le vendeur de légumes raconta l’histoire à la femme du pasteur ahurie d’autant plus qu’il en rajoutait pour mieux profiter de l’aubaine.

Et ça vient du facteur et de Jules ? se fit confirmer la pastourelle méditant déjà sa vengeance, nous allons voir ce que nous allons voir et ces deux ne perdent rien pour attendre.

Rentrée chez elle, avec la complicité de Maria qui savait se servir d’un ordinateur, elle composa des faux courriers à l’entête de la république en prenant soin de bien faire apparaître le logo bleu-blanc-rouge sur les enveloppes, les adressa à quelques-uns, et envoya le tout à une amie à Paris pour qu’elle les poste de la capitale. Il fallait que ça fasse vrai.

Quelques jours après, le facteur trouva dans sa sacoche postale les supposés Présidentiel courriers destinés à Monsieur le Ministre du Culte en Église de la ville, Monsieur Le Ministre de l’évangélisation (à l’adresse de Jo) et un autre destiné à Jules comme Ministre de l’implantation d’église.

Si le pasteur Roger goûta fort peu à la plaisanterie, Jo fut plus conciliant et le maître du bistrot compris tout de suite d’où ça venait mais ne dit rien laissant perdurer sa blague et asticotant le facteur qui s’était précipité chez sa femme pour affirmer que les membres de l’Église allaient être décorés. L’information qui fut aussitôt relayée.

Dans toute la ville, on ne parlait bientôt plus que de ça et le Maire informé par la rumeur publique fut un peu vexé qu’on ne l’ait pas prévenu avant mais comprit vite de quoi il s’agissant quand le député Gaétan Vachère, son ennemi de toujours, l’appela furieux pour lui demander qu’est-ce qu’il avait encore manigancé avec ses appuis politiques. Allez savoir pourquoi, il ne le détrompa pas.

Bon, ce nouvel événement ne dura pas longtemps et fit rire à gorge déployée le petit peuple du canton et surtout lui montra qu’une église n’est pas nécessairement austère.

Ce qui permit à Jo de préparer son prochain sermon d’évangélisation avec pour thème les noces de Cana durant lesquelles Jésus avait transformé l’eau en vin ce qui prouvait qu’il n’était pas si religieux que ça et savait s’amuser.

D’ailleurs, l’histoire nous amena du monde, et le dimanche suivant le bâtiment de l’Église était complet au point que ce jour-là nous dûmes organiser non pas une, mais deux rencontres à destination de ceux qui voulaient écouter la Parole de Dieu.

- Quand je pense qu’il y en a qui organisent des concerts pour attirer du monde, confia Roger à Jo le lendemain matin, mais qu’est-ce qu’il leur a pris ?
- Je pense tout simplement que le Seigneur veut nous montrer quelque chose, répondit Jo méditatif.
Nous avons engagé des campagnes de distribution de tracts dans les boites à lettres, les jeunes veulent aller chanter dans la rue et taper aux portes, nous cherchons des occasions d’évangélisation, mais il faut bien reconnaître que tous ces moyens ne portent que peu de fruits et que les âmes nous rejoignent d’une autre manière. Cherchons la vraie recette de notre succès relatif .

En effet, Jo et Roger étaient bien placés pour constater que c’étaient « les événements » et non des techniques qui avaient emmené plus de soixante personnes au pied de la croix ces trois derniers mois et que, à part servir dans l’obéissance, ils n’avaient pas vraiment organisé grand chose en ce sens.

« Samuel dit: L’Éternel trouve-t-il du plaisir dans les holocaustes et les sacrifices, comme dans l’obéissance à la voix de l’Éternel ? Voici, l’obéissance vaut mieux que les sacrifices, et l’observation de sa parole vaut mieux que la graisse des béliers. » 1 Samuel 15:22

- En fait, reprit Jo, je pense que c’est plus notre témoignage qu’autre chose qui a attiré ces gens vers le Seigneur même si nous n’avons en définitive rien fait ou si peu pour cela car nous n’en avons pas trop eu le temps.
Ils ont été touchés par la grâce qui nous anime et c’est vrai que nous ne prêchons pas une religion ou une dénomination, mais au contraire nous portons notre regard sur Dieu Lui-même ce que nous avions perdu l’habitude de faire avec nos structures riches financièrement mais pauvres spirituellement.

Regarde tous ces frères que nous n’avons pas eu à convaincre avec des mots sempiternellement ressassés, ils sont capables de parler de leur foi sans crainte et sans rien rajouter.
Le fait que nous ayons fait une distinction entre "le monde" et l’Église dés le départ leur a donné une identification céleste et ils n’ont pas à se défendre des religieux car les doctrines ne les intéressent pas. Ils vont tout de suite à l’essentiel et ne parlent pas de " leur  église" mais du besoin de Salut et de Dieu.

Le résultat en est que l’évangile est prêché dans sa vérité et que les scories ne sont même pas mentionnées.

D’ailleurs, quand ils parlent entre eux, il est plus question de salut pour les perdus que « d’histoires d’églises » et, même s’ils ont besoin d’être affermis et si certains font encore quelques bêtises, ils ont tous ce besoin d’être nourris spirituellement et je bénis mon Dieu chaque soir d’en être arrivé là.

- Oui, répondit le vieux pasteur, je devrais être étonné de ces résultats mais cela me semble naturel quoi que je me demande jusqu’où nous irons comme cela.
- Dieu seul le sait dit Jo avec un peu d’appréhension lui aussi.

Jésus, du haut des cieux, approuva et se demanda Lui aussi jusqu’où ils pourraient aller.

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