Laissons là notre Pasteur Principal aux prises avec ses objections de conscience et frappons à la porte de la chambre de Jo qui lui non plus ne savait plus trop quoi penser.

Pour lui, c’était réglé d’avance.

Sa première expérience dans sa dénomination passée lui avait montré que quoi qu’il fasse, il allait se faire jeter.

Ici, « les chrétiens ne peuvent pas héberger des démons ». Point.

Bien sûr, le petit peuple de l’église ne savait pas ce qu’il s’était réellement passé dans le bureau du Pasteur, mais les informations allaient filtrer et nous saurions bientôt que l’équipe pastorale donnait subitement dans la démonologie. Nous serons vite taxés de secte.

Le pasteur Jo était un peu inquiet.

Pour moi, pas de problème, je suis jeune, pas de famille à charge et je peux travailler des mes mains.

Mais pour Pasteur Roger, il n’est pas encore à le retraite et, étant né dans sa dénomination, il va être difficile pour lui de vivre une foi exemplaire maintenant qu’il a été touché par la grâce de Dieu.

Comment concilier ce qu’il a appris avec ses membres qui n’en veulent pas plus et ses autorités qui n’aiment pas la houle. Peut-il se taire maintenant qu’il a vu Jésus ?

A moins qu’il essaye de ménager la chèvre et le chou et s’enfonce dans un compromis dans lequel il ne sera plus jamais à l’aise.

Je ne sais pas si il aura le courage de parler car les gens qui peuplent son église ne peuvent pas comprendre que Dieu existe et qu’Il est présent parmi nous. Leur foi est superficielle et il est impossible dans ce lieu de faire des disciples. Des disciples de quoi ?

Jo ne savait pas que de son côté Roger avait déjà pris sa décision même si il ne savait pas encore comment faire. Notre jeune pasteur s’agenouilla au pied de son lit.

Dans la maison du pasteur Principal, Martine, son épouse, était aussi en prière.

Venant d’une autre dénomination un peu plus spirituelle que celle de son mari, elle avait gardé la pureté et la simplicité de l’évangile.

Ici, on prêchait la soumission de la femme vis à vis du mari, le foulard à l’église sur la tête, la suprématie du Pasteur sur ses ouailles et son rôle était d’être effacée. N’avoir la parole que si on la lui concédait. Une vie de silence.

Elle n’en vivait pas moins une foi simple et profonde et, si elle criait des alléluia comme les autres et parlait le jargon évangélique couramment, elle avait une limpidité de cœur peu commune et persévérait dans la prière tous les jours en demandant à Dieu sa grâce et le Salut pour son mari. C’était son secret.

Ce jour-là, son intuition féminine ou le Saint esprit, allez savoir, lui avait bien montré que son cher et tendre un peu sévère d’habitude avait un je ne sais quoi de changé et n’osait croire à un coup de théâtre. Nous sommes parfois bien résignés.

Et Jésus lui parla.

Ce qu’il lui dit, personne ne le saura jamais et elle se leva rayonnante. Elle sut son mari sauvé.

Elle prépara vite la table, la garnit d’un bouquet de fleurs rieuses et colorées , alluma des chandelles comme pour un repas de fête et attendit son homme le cœur plein d’une joie qu’on ne saurait exprimer.

Roger rentra pour le souper.

Tout de suite méfiant, il se demanda si il avait oublié quelque chose. Un anniversaire peut-être, une occasion de festoyer ?

Comme il ne savait pas, un peu penaud peut-être, il fit comme si de rien n’était, mais remarqua l’allure de sa femme qui le regardait comme si il rentrait de voyage.
Allez savoir pourquoi, il pensa au fils prodigue de la Bible et se dit que Dieu était bon parce que la bonne humeur de sa moitié allait lui faciliter la tâche. Il devait lui parler.

Ce qu’il ne savait pas, c’est que Martine était en louange et se préoccupait plus à ce moment là de la Gloire de Dieu que des difficultés de son mari, emprunté, qui cherchait encore comment aborder une conversation qui risquait de faire des étincelles. Sa femme n’était pas fille d’un pasteur reconnu de la dénomination d’en face ?

Roger, c’était nouveau pour lui, plutôt que de prononcer l’habituelle bénédicité demanda à Jésus :

-  Je t’ai confié ma vie Seigneur, maintenant, il va falloir assurer. Ouvre une porte que je lui parle. Si il te plait.

Jésus, riant sous cape, rompit le pain.

En fait de pain, c’est la glace qui fut rompue

Roger fondit en larmes et raconta à Martine son bonheur. Il lui dit tout.
Comment il avait méprisé les fidèles infidèles, comment il préservait sa hauteur, la soumission coupable à des autorités qui n’en avaient pas, comment Jésus parle quand on s’adresse à lui et enfin, il conta la vison du paradis et des ténèbres.

« De même, je vous le dis, il y aura plus de joie dans le ciel pour un seul pécheur qui se repent, que pour quatre-vingt-dix-neuf justes qui n’ont pas besoin de repentance. » Luc 15:7

L’épouse, pour ne pas gêner son bien aimé ne dit rien et pris sa main. Ils restèrent longtemps sans mot dire et, dans la plénitude de Dieu, Roger savait déjà que sa femme comprenait et adhérait à sa nouvelle conviction.

La fin de la soirée ne nous regarde pas mais nous savons que dans le ciel, la Trinité buvait le champagne. Le diable, vaincu, se retira dans sa caverne en jurant qu’il reviendrait encore plus méchamment et les anges chantaient « Après moi le déluge » et reprenaient en cœur ce couplet qui avait encore une fois sauvé une âme…

Il est sorti du tombeau,
la mort a perdu sa puissance,
Il est sorti du tombeau,
C’est pourquoi j’ai l’espérance,
Il est sorti du tombeau,
Alléluia !

Le lendemain, Jésus trouva tout le monde endormi alors que matines avaient déjà sonnées.

Il faut dire que la nuit avait été paisible et l’anxiété de ces derniers jours avait mis les cœurs à dure épreuve. Tout le monde avait besoin de repos.

Nos amis se retrouvèrent dans le bureau du Pasteur Principal sans formalité cette fois, et Madame Martine s’était invitée sans qu’on lui demande rien ni qu’on la repousse ce qui n’aurait manqué d’arriver les autres fois.

Sans se concerter, ils se retrouvèrent à genoux dans un temps de louange et Jésus remarqua qu’ils avaient oublié de prendre les livres de cantiques. Il semble qu’ils n’en aient plus besoin se dit-il plus joyeux que d’habitude.

Puis, on pria.

Ils ne prièrent pas pour eux, ils n’en avaient nul besoin, mais intercédèrent pour la ville, pour les membres de leur assemblée qu’ils savaient devoir hélas abandonner, ils prièrent pour les califes de leur dénomination et demandèrent à Dieu de leur montrer le chemin. Et les heures ont passé.

Devant le bâtiment de l’église, les âmes attendaient et s’inquiétaient que les portes n’ouvraient pas comme d’habitude. Il y avait les chaises à ranger et la salle à préparer pour la cérémonie du soir.

De plus, une réunion des anciens, le comité d’église devait se tenir cet après midi là, et nous ne pourrions souffrir d’aucun retard. Ces dames du comité voulaient savoir si la rencontre était remise et quelles dispositions prendre si c’était reporté.

En fait, elles savaient que ça bougeait dans l’église et étaient vexées de n’être pas invitées.

A l’intérieur, répondant à la demande de deux ou trois réunis, le compte y était, Jésus avait déjà accordé la demande. Il allait aujourd’hui même montrer la route à ses pèlerins.

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